Je diffuserai à l'avenir quelques souvenirs de concerts de Nilda Fernandez, mais dès à présent pour planter le décor, j'ai choisi de publier le texte qui va suivre. Je l'ai écrit à l'occasion d'un concours organisé par l'artiste ; il s'agissait d'écrire un texte sur un des opus de Nilda, étant une inconditionnelle, le plus difficile a été de choisir l'album, le plus plaisant d'en faire couler les mots, le plus touchant d'avoir été choisie par Nilda et de l'avoir rencontré, mais ce moment nous appartient, je vous livre donc ce texte :

Une pochette bleue comme un ciel clément domine la pile de ma collection musicale. Un regard d’homme serein, réfléchi, donc rassurant, qui pose spontanément chaque mot avec justesse, -le don d’un ciel clément sans doute- me donne une envie coupable, tout à la fois égoïste et délicieuse de troquer la vilaine face du monde.
Cet homme m’aura donné raison de ce choix, au moins pendant 39 minutes et 42 secondes, pour une conciliation entre êtres humains, c’est un bon début.
C’est écrit blanc sur bleu, là, sur la pochette : cet album n’est pas destiné à l’anonymat de milliers de personnes, il s’agit d’une missive individuelle, cachetée à la cire…bleue.
Je la décachète et la pose sur le lecteur qui m’offre les premières notes. Dès l’instant tout s’apaise, paix à mon âme, paix à la terre. C’est comme une entrée dans une église, un je ne sais quoi qui t’enveloppe de bien-être. Une voix limpide te caresse, te cajole, puis t’élève d’une mélodie aérienne.
J’écoute la demande d’amour d’un homme à une femme, murmurée presque comme une supplique. Je me laisse très vite convaincre, m’émouvant de cette quête amoureuse dite par un homme à une femme, comme si les souffrances du cœur étaient seulement l’apanage de ces dernières. Le baume salvateur de cette voix tourne la page de mes blessantes convictions.
Le « Je », auteur de l’album, suscite une écoute attentive et lucide faisant de chacun la deuxième personne du singulier et non la dernière d’un pluriel dont il est l’évadé.
Ici nos désirs parfois fragiles et enfouis résonnent en un écho intime.
La voix se tend, s’aiguise ; l’interprète monte au sommet de son observatoire terrestre d’où il brise de paroles ciselées, la glace du mensonge amoureux. Cette trahison sentimentale condamne radicalement « la dernière femme » autour d’une joyeuse ronde médiévale.
Ca y est, cette fois la mesure tape hispano-jazz aussi décadente que la folie de cette superbe « Gitana » et que l’amour démesuré de son complice martyr. Me voilà partie dans un dernier tourbillon pour cet ultime et désinvolte rêve de l’amour, cadencé par la plus paradoxale tragédie espagnole.
Je reçois une bonne dose d’énergie avant le retour nostalgique à Ma ville, baignée elle aussi d’une imperfection splendide. Je tends bien l’oreille à Sinfanaï Retu, aucune faute d’accord n’apparaît non plus dans cet espéranto de libre interprétation, mêlé de cyniques menaces qui deviennent tendres, caressées d’un humour bucolique parce qu’après tous ces désenchantements Il l’aime. Tandis que Marie-Madeleine plonge son créateur dans une nouvelle tourmente sentimentale, je comprends de manière définitive que la paix est irrémédiablement introuvable, que l’autre te couronne autant qu’il te crucifie.
Nilda habille les travers humains d’une poésie touchante, dénonçant le mensonge avec splendeur, le pire étant le silence que l’On t’a appris. Une alternative à la croix que tu portes aussi, à la vilaine face du monde.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire